«Les gens font de l’humour noir tous les jours»

01/04/2014

En tournée dans toute la France avec son troisième one-man-show “Hallelujah Bordel”, Jérémy Ferrari fait escale au Grand Angle de Voiron jeudi. Dans ce spectacle, joué plus de 700 fois à Paris, l’artiste, découvert en 2010 par l’émission de France 2 « On n’demande qu’à en rire », se moque des religions avec son humour noir et acide habituel. En Belgique, pour l’inauguration de son festival mêlant humour et musique “Smile and Song”l’artiste, pris d’un rhume des foins, répond à nos questions.


Parler de religion dans un spectacle, n’est-ce pas au départ un pari risqué ?

Au début, on m’a effectivement dit qu’un spectacle de deux heures sur la religion ne marcherait pas. Je souhaitais traiter de cette question d’abord parce que je lis beaucoup de philosophie. Puis, j’aime dénoncer les discriminations. Je crois que la religion est très importante dans la vie, que l’on soit croyant ou non. Ce qui importe, c’est qui le dit et comment on le dit. 

D’où vous vient cet humour noir, ce style, ce ton que vous incarnez aujourd’hui ?

Depuis tout petit, j’ai toujours adopté ce ton. À 13-14 ans, j’abordais des thématiques telles que le racisme, les femmes battues, l’homosexualité, l’adoption, la mort… C’était le cas aussi dans mon premier spectacle que j’ai entièrement créé à 17 ans. Dans la vie comme sur scène, je suis très habité par ce que je raconte. Je passe mes journées à sortir ce genre de vannes. Les gens font de l’humour noir tous les jours.

Quel regard portez-vous sur la société ?

Je représente une nouvelle génération. Parmi les gens de 15-35 ans, beaucoup s’en foutent que tu sois arabe, noir, gay. Il y a un vent d’air frais. Notre génération en a marre des réactionnaires qui passent leur temps à rejeter l’autre. La manifestation contre le mariage gay est le dernier soubresaut d’une France catholique qui est en train de mourir. 

Vous avez été souvent critiqué par le monde des médias vous accusant parfois d’aller trop loin. Comment le vivez-vous ?

Je m’en fous de la critique. Je crois que le CSA [Conseil supérieur de l’audiovisuel, NDLR] est dépourvu de second degré. C’est une instance dangereuse qui représente un gouvernement qui a peur, qui bâillonne les artistes. Pour ma part, je n’ai jamais été censuré sur “On n’demande qu’à en rire”. Je ne vais pas vous dire que c’est pareil pour tout le monde. Après l’affaire Dieudonné, les directeurs de chaînes sont plus peureux. Alors que c’est l’inverse qu’il faut faire. Je ne ferai plus aucune émission qui ne me donne pas 100 % de liberté d’expression.

"On n'demande qu’à en rire”, l’émission qui vous a révélée revient le 7 avril sur France 2. Allez-vous jouer un rôle dans la nouvelle mouture du programme présenté par Bruno Guillon ?

Catherine Barma [productrice de l’émission, NDLR] aimerait beaucoup que je revienne. Pour l’instant, je n’ai pas pris ma décision. Je vous avoue que je ne suis pas emballé. Il est peut-être temps de laisser la place aux autres.

Quels sont vos projets aujourd’hui ?

J’écris mon nouveau spectacle sur le thème de la guerre ainsi qu’une comédie sombre très provoc’dont l’univers sera celui du chômage. Je produis également l’artiste Guillaume Bats.
 

Jérémy Ferrari, le jeudi 3 avril à 20 heures au Grand Angle à Voiron. 

Par Ludovic GALTIER pour Le Dauphiné