Article de presse : "Au début, j'étais une bête de foire"

19/01/2017

Avec son One man show Hors Cadre, Guillaume Bats a fait de son handicap (la maladie des os de verre) sa force.


"C'est une maladie génétlque mais avec différents stades", confie Guillaume Bats, I'humoriste "à la gueule de boomerang" de 29 ans (protégé de Jérémy Ferrari et révelé par On ne demande qu'à en rire) qui est né avec 27 fractures. "Un peu comme dans le film Incassable, même si ce dernier est évidemment romancé. Je ne suls pas comme Samuel L. Jackson qui est obligé de s'asseoir en chaise roulante car le poids de son corps pourratt le briser. Moi, j'ai eu de la
chance, en grandıssant, de me solidifier un petit peu. Je sais ce que je peux faire ou ne pas faire. Je ne vais pas m'inscrire dans un club de Rugby, par exemple !" (sourire)

L'autodérision semble être la meilleure arme dans de telles conditions de vie...
Oui, c'est pourquoi mon spectacle est une chronologie de ma vie. Je me raconte, je parle de ma vie avec beaucoup de recul et d'autodérision car c'est ce que je fais dans la vie. Il est donc logique de montrer cela aussi sur scène et de ne pas jouer quelqu'un que je ne suis pas !
Vous êtes donc un humoriste à l'humour noir et grinçant ?
Jérémy Ferrari m'a aidé à me rendre meilleur. Mais j'ai déjà en moi cette envie de déranger. Je suis très content si je peux déranger. J'aime quand les gens sont surpris car on me voit différemment. On est plus à écouter ce que je dis et ce que je fais qu'à regarder ce que je suis physiquement. Et ça, je préfère. 
Votre handicap est alors finalement devenu votre force ?
C'est une belle phrase que j'entends souvent mais je ne peux pas dire le contraire. Les mecs aigris disent que si j'ai réussi, c'est parce que je suis handicapé. Au début, peut-être que oui. Car j'avais un peu le sentiment d'être une bête de foire qu'on expose, histoire de faire le buzz. Mais plus aujourd'hui. Ok, je suis handicapé et bizarre, mais après ? S'il n'y a pas de fond, si le spectacle est mauvais, le buzz va retomber comme un soufflet. 
Devenir humoriste était-il le seul métier qui vous tendait les mains ?

Je ne me voyais surtout pas faire quelque chose d'autre. On m'a dit aussi que je me servais de mon handicap mais c'est pareil pour les humoristes noirs qui ne feraient que de l'humour noir. Enfin, que des blagues sur les Noirs. Je ne parle pas que du handicap, et je n'attaque pas que les handicapés mais bien tout le monde. Parfois, certaines personnes valides sont plus choquées ou en reclus et plus gênées par rapport à certains propos qu'à des personnes handicapées. Elles, elles me remercient. Une personne m'a même dit un jour : 'Je suis presque content d'être handicapé après avoir vu ton spectacle'. Ça fait plaisir. 

Avec la notoriété, le regard des gens a-t-il changé ?
C'est marrant, mais oui. Car il y a quelques années, lorsque je ne faisait pas de télé, quand quelqu'un me regardait ou me fixait, je savais que c'était parce qu'il se moquait de moi. Aujourd'hui j'en doute. Soit il se fout de moi, soit il m'a reconnu. Et, en général, je le décèle rapidement car, souvent, un sourire ou un regard complice s'installe. Je subis moins de regards réprobateurs aujourd’hui, faut avouer. 
Peut-on parler d'une revanche sur la vie ?

Totalement. Car c'est une façon de dire aux personnes qui se sont moquées de moi à l'école, et qui ont peut-être une vie de merde, que moi je m'amuse. Donc, au final, qui a gagné ? Je n'ai pas envie de me sentir comme les autres, je suis très bien comme je suis. Enfin, aujourd'hui, je dit ça car ça se passe bien pour moi. Si je n'avais pas réussi dans ce que j'aime, même si la route est encore longue, j'aurais peut-être été beaucoup plus aigri. De toute façon, on est tous différents. Puis, ce mot ne veut tellement rien dire pour moi ... 

Vous est-il arrivé d'avoir eu envie de tout abandonner ?
Concrètement, je ne pense pas... Mais j'ai subi une grosse opération chirurgicale en 2014 où j'étais aux soins intensifs et même passé en réanimation car j'étais vraiment dans un état critique. Je pense que j'aurais pu me déconnecter et me dire : 'C'est bon, tu as vu dans quel état tu es ? Lâche tout puis laisse toi partir...' je pense que ma force intérieure m'a dit : 'Non, bats-toi, t'en chies mais tu as des choses à faire. Bats-toi pour ce que tu veux être : faire marrer les gens'. Alors, ça commençait par sortir d'ici. Si je ne parlais que de ces vraies choses dans mon show, ce serait de la tragédie, car ma vie peut paraître brute. Il y a eu des moments de bonheur, je n'ai pas envie de me pendre non plus mais à ce niveau-là, c'est une revanche sur la vie. Mon caractère m'a sauvé.